Accéder au contenu principal

Non à la signature d'un accord franco-comorien contre la circulation des Comorien-ne-s

Une visite de François Hollande à son homologue comorien, Ikililou Dhoinine, est prévue le 26 juillet prochain. La coopération franco-comorienne est déjà scellée par une déclaration d'amitié et de coopération et par un document cadre de partenariat signés à Paris le 20 juin 2013. Un accord instituant un partenariat de défense est entré en vigueur le 1er mai 2013, plusieurs formations de militaires comoriens ont été effectuées par l'armée française et de nombreux accords économiques ont été signés entre les deux États. L'objectif officiel de la prochaine rencontre présidentielle dans la capitale comorienne est le sommet de la Commission de l’océan Indien. Mais l'enjeu majeur pourrait bien être la signature d'un accord bilatéral défini, sans plus de précisions, comme « relatif à la circulation des personnes », élaboré en toute opacité. Selon une version connue à ce jour de cet accord, il s'agit de la circulation depuis trois îles de l'archipel des Comores - la Grande Comore, Anjouan et Mohéli - vers la quatrième - Mayotte. Elle sera facilitée pour une caste dirigeante comorienne qui, à ce prix, accepte de coopérer avec la France pour mieux l'interdire aux autres.

Des visas de circulation (à entrées multiples pour des courts séjours) facilités essentiellement pour une minorité privilégiée (acteurs et actrices économiques et culturel-le-s, sportif-ve-s de haut niveau, avocat-e-s, médecins) avec une attention particulière aux fonctionnaires, diplomates et membres d'ONG ; d'autres personnes pourront en bénéficier : pour raison de santé, pour la famille proche de comorien-ne-s titulaires d'un titre de séjour délivré à Mayotte, pour les obsèques d'un proche parent. Et un-e étudiant-e ayant obtenu un diplôme équivalent au master pourra être autorisé-e, pendant six mois, à compléter sa formation par une expérience professionnelle à Mayotte.

À l'égard des autres Comorien-ne-s, l'accord prévoit une coopération contre la circulation vers Mayotte et pour l'expulsion de ceux/celles qui y vivent. L'Union des Comores s'engage en effet à accepter toute personne reconduite de Mayotte vers l'une des trois autres îles et à coopérer avec la France pour interdire la circulation non autorisée vers Mayotte - pour la « sécurité de l'ensemble des points d'entrée et de sortie du territoire comorien », pour le « démantèlement des filières », pour la « sécurisation des titres d'identité et de voyage des ressortissants comoriens » et contre la « fraude documentaire ». Une coopération spécifique est même prévue en vue du « retour dans leur commune d'origine » des mineur-e-s comorien-ne-s présent-e-s à Mayotte... alors que, selon le recensement 2012 de l'INSEE, 33 000 étranger-e-s – dont la plupart sont des mineur-e-s comorien-ne-s – sont né-e-s à Mayotte. Ce montage inéquitable en rappelle d'autres. La France et ses partenaires européens œuvrent en effet depuis une dizaine d'années pour renforcer leurs politiques d'expulsion des étrangers et de fermeture de leurs frontières par une coopération des États d'origine et de transit des migrant-e-s. À l'issue de longues tractations sur l'octroi de contreparties à des États réticents à renoncer ainsi à leur souveraineté, des dizaines d'accords, bilatéraux ou multilatéraux, « de réadmission » ou de « gestion des flux migratoires » sont déjà en vigueur.

Dans un théâtre bien plus petit puisque Mayotte n'est qu'à 70 km de l'île d'Anjouan, l'accord franco-comorien qui s'annonce leur ressemble. Les conséquences dramatiques de cette politique française aux frontières de Mayotte qui jamais ne parviendra à bloquer la circulation dans l'archipel, mais qui la rend toujours plus périlleuse ressemblent, elles aussi, aux effets de la politique migratoire européenne. Et qu'en est-il de la vie des quelques 200 000 habitant-e-s de Mayotte enfermé-e-s dans un bunker isolé de l'océan Indien à l'instar de l'Europe qui prétend protéger ses habitants dans une forteresse contre un « ennemi imaginaire »?

Dans le cas comorien, ce jeu de dupes était pourtant particulièrement délicat. Car, depuis 1975, l'Union des Comores revendique sa souveraineté, reconnue à ce jour par l'ONU, sur les quatre îles de l’archipel … y compris Mayotte dont la France a fait un département. Certes ce projet d'accord évite soigneusement de mentionner le statut de Mayotte. Mais qui peut douter que la signature de ce texte par le gouvernement comorien vaut reconnaissance implicite de la séparation et du statut français de Mayotte ?

Il est encore temps ! Ce projet d'accord ne doit être ni signé, ni ratifié par les deux parlements.

Signataires

Réseaux associatifs :
Sortir du Colonialisme, Migreurop (réseau européen et africain).

Associations :
Comité Maoré, GISTI (Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés), FASTI (Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s), Emmaüs international, IPAM (Initiatives Pour un Autre Monde), OCU (Organisation pour une Citoyenneté Universelle), Fondation France Libertés, MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples), ATMF (Association des Travailleurs Maghrébins de France), FTCR (Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives), AFASPA (Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique), LDH (Ligue des Droits de l’Homme), ACDH (Association Comorienne des Droits de l'Homme), GAC (Guilde des Artistes Comoriens), GRITAC (Groupe de Réflexion pour l'Intégrité Territoriale de l'Archipel des Comores), CDISCOM (Collectif de Défense de l'Intégrité et de la Souveraineté des Comores), CAAC (Collectif des Associations et des Amis des Comores), FNC (Front Nouveau Citoyen – Mali), RIDEC (Relais d'Initiatives de Développement Concerté – Mali), Amicale Panafricaine, FPR (Front Pour le Refus), Village d’EVA, SOS-Démocratie Comores, CDD (Collectif pour la Défense de la Démocratie aux Comores), MUSC (Mouvement pour l'Unité et la Souveraineté des Comores), ATF (Association des Tunisiens en France), Espace Farabi, IDEAL – 92, Association Femmes Plurielles, UTIT (Union des Travailleurs Immigrés Tunisiens), Respaix Conscience Musulmane, DIEL (Droit Ici Et Là-bas), CSP 75 (Coordination des Sans-Papiers 75), Coordination 93 de lutte pour les sans-papiers, ACORT (Assemblée Citoyenne des Originaires de Turquie), UJFP (Union Juive Française pour la Paix), UND (Union Nationale Démocratique du Tchad), ADD (Association pour la Démocratie et le Développement – Djibouti), Mouvement Anticolonialiste Mahorais, Watwaniya, Montsi.

Partis politiques :
Ensemble (mouvement politique français), DJAWABU (parti politique comorien), MDA (Mouvement Démocratique pour l'Avenir des Comores), PCA (Parti Comores Alternatives), Front Démocratique des Comores, Travayer La Rényon (groupe politique réunionnais), PCF (Parti Communiste Français), NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste), EELV (Europe Ecologie-Les Verts).

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

EL MAAROUF : un chancre sur le visage du pays !

Ces derniers jours la grève à EL MAAROUF fait réagir et a conduit le Gouvernement à sanctionner un de ses piliers! Le fonds de la question bien évidemment sera maquillé. Il n'en restera pas moins comme ce fut toujours le cas que le "principal" hôpital du pays donnera une image fidèle de la réalité lamentable de notre pays. Et chaque comorien en porte sa part de responsabilité. D'abord les dirigeants qui se sont succédés à la tête du pays. Tous sans exception, ceux qui sont passés et ceux qui terminent leur mandat. La situation d'EL MAAROUF illustre leur incurie, leur irresponsabilité et les condamnent sans réserve. Et pourtant l'argent a coulé à flots ! Durant ces vingt dernières années les soutiens des partenaires bi et multilatéraux sont innombrables. Des beaux bâtiments entrain de tomber en ruines ! Les experts se sont bousculés au chevet d'EL MAAROUF. Rien, rien de rien ! On a eu droit comme il est d'usage, à ces fameux "séminaires-défoulemen

Des manuels d'histoire des Comores au service de la France

Un historien comorien a adressé au Comité Maore le courrier suivant. Il dénonce des falsifications de l'Histoire des Comores destinées à conforter les thèses française sur Mayotte française. Je le publie en intégralité Je vous écris pour vous mettre au courant ou vous rappeler qu'un manuel scolaire d'histoire pour les classes de 6e et 5e vient d'être édité pour application à la rentrée prochaine. L'aspect pédagogique laisse moins de place à la critique. Mais certains choix des documents frisent à la collaboration. Il y a en effet entre autres les titres de "Mayotte et les Comores", et "L'archipel aux sultans batailleurs". Les jeunes comoriens vont apprendre que Mayotte ne fait pas partie des Comores. "L'archipel aux sultans batailleurs" est un raccourci servant de justification à la colonisation française qui y a remis de l'ordre. En même temps c'est une abnégation de l'existence d'un Etat comorien avant

AZALI A L’ONU : ENTRE RIDICULE, HONTE ET REVOLTE

Il s’agit bien évidemment du discours d’Azali devant la 78 ème AG de l’ONU. Ridicule quand le président de l’Union Africaine (UA) joue à la « grenouille qui veut se faire aussi grosse que la vache » sous les applaudissements soutenus de son clan. S’attribuer un succès illusoire comme l’inclusion de l’UA dans le G20 relève de l’usurpation. Car il s’agit d’une revendication de longue date des Chefs d’Etat pro français comme Ouattara, Macky Sall, Talon, etc. Le G20 qui regroupe des pays intègre un continent !? L’immense Afrique avec ses 54 nations, ravalée au niveau d’un pays. Réduire la lame de fond qui secoue l’Afrique dite francophone à des simples « changements anticonstitutionnels » relève de la prestidigitation lorsque cette caractérisation provient d’Azali, un putschiste multi récidiviste qui s’apprête à commettre un holdup électoral. Réclamer « un multilatéralisme plus juste, … l’accompagnement des partenaires de la Communauté Internationale, … miser sur la réalisation de