Il est des moments cardinaux où un
pays joue avec son destin. Tout indique que notre pays vit ce genre
de situation, un rendez-vous décisif avec son histoire. Le pays
va-t-il tourner la page des régimes plus ou moins oppressifs, peu
respectueux des lois. Ces multiples régimes portés par un clan et pratiquant le clientélisme et la
corruption à grande échelle. Le pays va-t-il ouvrir une nouvelle
page où les lois du pays seront systématisées et respectées dans
l’esprit et la lettre, où les partis politiques ne seront plus des
clans autour d’une forte personnalité, où fleuriront des débats
apaisés portant sur le progrès économique et social, où les
habitants de notre petit pays sortiront progressivement de la
pauvreté.
Il
ne s’agit pas d’un rêve éveillé mais de l’enjeu des
batailles politiques en cours.
Le
déclencheur c’est incontestablement le déroulement grotesque des
élections du 24 mars 2019 dans un contexte perçu comme marqué par les
promesses d’une manne pétrolière qui affole les appétits des
rapaces du monde.
Le
pouvoir ne semble pas mesurer la portée du mouvement de protestation
qui prend de l’ampleur dans l’émigration comorienne en France et
ailleurs. Un mouvement appelé à s’étendre à tout le pays.
Ntsudjini et Mbéni ont manifesté, différentes formes d’action
se font jour (appel à faire du bruit tous les 17h) et l’imagination
du peuple nous étonnera sans doute.
Ce
n’est pas un mouvement de haine contre qui que ce soit. Au
contraire c’est un mouvement d’amour, d’amour du pays, de
patriotisme renouvelé. Bien sûr il y a de la colère. Elle
traduit les souffrances endurées depuis l’indépendance. Une plaie
infectée de plus de 40 ans et qu’on vient de raviver avec ces abus
arrogants qui se succèdent depuis les « assises ». Cette
colère est tout naturellement dirigée contre Monsieur Azali. Pas
contre sa personne mais contre
le Président qui,
à ce titre, est
le principal responsable de tout ce qui arrive au pays. D’autant
plus que c’est lui qui
apparaît comme le principal bénéficiaire de toutes les turpitudes
du processus électoral de mars dernier.
C’est
un mouvement politique qui
n’est pas au service d’ambitions politiques de qui que ce soit,
qui n’est partisan d’aucun
clan. Il affirme haut
et fort son attachement aux
intérêts bien compris du pays. Il est articulé autour de
revendications saines qui
peuvent changer le cours de l’Histoire du pays :
1-
Il rejette
absolument, résolument les
élections du 24 mars 2019.
Elles ont été organisées par des institutions (CENI et Cour
Suprême) sans crédibilité. Une
CENI dont le président n’a pas été lavé de l’accusation d’un
détournement de plusieurs centaines de millions. Cette
CENI des 104 % et d’un troisième tour ! Une
Cour Suprême dont tous les membres sont nommés par le président
Azali, ce qui ne peut que générer des doutes sur leur indépendance.
A cela il faut ajouter le
décompte des voix , effectué hors de toute norme, ouvrant
toute grande la porte à toutes les tricheries.
C’est du jamais vu dans l’histoire électoral du pays. Personne
ne peut croire que c’était le seul moyen de sécuriser la
finalisation des votes. Il s’en suit qu’aucun
pouvoir ne peut espérer en
retirer de
véritable légitimité citoyenne. Bien
évidemment, on peut toujours chercher à s’imposer par la force et
alors on sombrera dans une dictature féroce, inévitablement
condamnée à mal finir.
2-
L’absence de respect des
lois a pris ces derniers temps des proportions exagérées qui heurte
de front tout esprit indépendant.
Les conditions de dissolution de la Cour Constitutionnelle ont
dépassé toutes les limites. La remise sur les rails de la Cour de
Sûreté de l’État pour venir prononcer des lourdes peines dans
des procès contestables ont provoqué un choc dans l’opinion. Des
personnalités politiques et des journalistes sont emprisonnées sans
aucun respect des procédures..
3-
La situation n’est pas
simple à dénouer à première vue mais elle le sera si les
dirigeants politiques cessent de mettre en avant leurs intérêts
partisans au profit des intérêts du pays. Il
faut commencer par dissoudre la
CENI et la recomposer par des personnalités connues pour leur
intégrité. Il faut aussi poser la question d’une institution
faîtière qui inspirera de la confiance au pays ou
revoir les modalités de la composition de la Cour Suprême. On
pourra alors envisager la suite avec plus d’assurance.
On
ne peut pas construire un pays stable s’engageant dans une voie de
développement économique et social qui profite à tous les citoyens
sans partir sur des bonnes bases. Et
c’est cela l’objectif du mouvement populaire qui s’impose comme
une force rédemptrice.
Après les innombrables échecs rencontrés par le pays, on ne peut que souhaiter un vif succès à ce nouveau sursaut populaire.
Après les innombrables échecs rencontrés par le pays, on ne peut que souhaiter un vif succès à ce nouveau sursaut populaire.
Idriss (16/04/2019)
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