Le 17 septembre 2019 s’ouvrira à
New York, la 74ème session de l’Assemblée Générale de l’ONU
(AG). Une coutume annuelle ! Et comme c’est devenu la règle
depuis 1995, la « question de l’île comorienne de Mayotte »
(la question dans ce qui suit) restera cantonnée à l’Ordre du
Jour (OJ) provisoire. Personne ne demandera sa mise à l’OJ
définitif. Il n’y aura donc pas débat.
Pour
l’histoire, de 1976 à 1994, chaque AG de l’ONU publiait une
résolution pertinente qui dénonçait la politique française
d’occupation de Mayotte. La France a déployé des pieds et des
mains pour mettre un terme à cette situation qui gênait le donneur
de leçons en droits
humains.
La rupture intervint après le coup d’état de Bob Denard (1995),
le président Said Mohamed
Djohar fut déporté à La
Réunion, le gouvernement Caabi El Yachourtoui qui avait pris le
relais avait fait suspendre la question. Il revint à Mzimba,
ministre des affaires étrangères de Taki, successeur de Said
Mohamed Djohar, d’avoir
« définitivement » remis la question à l’OJ
provisoire pour, soi-disant, ne pas gêner les négociations entre la
France et les Comores. Aboudou
Soefo, ministre des affaires étrangères d’Azali 1 avait cherché
à aller encore plus loin : retirer la question de l’OJ
provisoire, en vain. Mais c’est tout comme, dans la réalité,
puisque depuis 1995, la question est passée aux oubliettes et la
France envisage sereinement les AG de l’ONU. Imaginez-donc que la
« départementalisation » de l’île comorienne par la
France n’a jamais été condamnée par l’ONU !
Dans
une de ses délectations moliéresques qui ornent le journal du
gouvernement, un artiste de la diplomatie considère que l’absence
de débat à l’ONU sur la question, n’a finalement pas
d’importance. Mesurez donc, les « kilomètres de résolutions
sur la Palestine ». Cela a-t-il fait évoluer les choses ?
Existe-t-il une question résolue par une résolution de l’ONU ?
Des questions autrement plus importantes pour le monde que l’annexion
de Mayotte font du sur-place malgré les prises de position des AG de
l’ONU. Et notre diplomate chevronné invite les extrémistes à
dépasser leurs « gauloiseries » (!), leur héritage des
« sultans batailleurs », à intégrer les changements et
à se ranger derrière la diplomatie mise en œuvre par le président
Azali, une diplomatie, à son avis, géniale qui parvient à
« croiser les intérêts » supposés antagonistes.
L’accord-cadre signé dernièrement en fournit un témoignage
saisissant, la meilleure orientation pour sauvegarder l’unité des
quatre îles.
Malheureusement,
les « extrémistes » que nous sommes, ne parvenons pas à
zapper les faits.
Dans
la conférence de presse clôturant les échanges entre les Comores
et la France, Macron soulignait l’appartenance de Mayotte à la
France en invoquant « le droit des peuples à disposer d’eux
même », Azali a réagi en brandissant les résolutions de
l’ONU qui prouvent que Mayotte est comorienne, une bouée de
sauvetage que lui tendait la vaine ONU, ce « machin »
sans importance!?
On
nous rétorque que la question est de plus en plus ignorée sur la
scène mondiale, que le monde a changé, que les solidarités
anciennes ont volé en éclats, qu’aucun pays n’est prêt à
sacrifier ses intérêts pour les Comores.
Lorsque
la question n’est plus débattue comment les autres pays se
renseigneront-ils, comment suivront-ils son évolution ? Lorsque
le pays ne défend plus conséquemment ses intérêts, comment les
autres pays se solidariseront-ils avec lui. Si lors de la
départementalisation de Mayotte, le président Sambi n’a rien
entrepris, que peuvent faire les autres pays. D’autant qu’ils ont
observé que parallèlement à la consultation à Mayotte, Sambi
détourna l’attention des Comoriens avec un référendum
constitutionnel. Peut-on être plus royaliste que le roi !? Le
Comité des 7 s’est solennellement réuni une fois, à Moroni, sur
initiative du … président Ali Soilihi. Quel autre président l’a
fait ? En réalité la solidarité entre pays n’est pas un
cadeau que l’on se fait entre présidents. Ce sont des communautés
d’intérêts qui se constituent autour de grandes questions. Dans
notre cas le respect de la Charte de l’ONU, les jurisprudences en
matière de respect de l’intégrité territoriale des pays, une
question sensible à laquelle sont confrontés bien de pays.
Si
l’on examine la diplomatie du président Azali sur la question les
doutes fusent. On est stupéfait !
L’encerclement
de Mayotte dans la Région, maintenue par tous les présidents
comoriens depuis 1975, créait à Mayotte une situation qui devenait
de plus en plus intenable. Azali 1 a osé et pris la responsabilité
de le rompre. Où a mené son « ouverture » géniale ?
Sinon à la
départementalisation. A la rupture de la solidarité envers les
Comores des pays de la Commission de l’Océan Indien.
Où
mènera la nouvelle ouverture d’Azali 3 ? Les Comores signent
un document officiel dont un des chapitres est consacré aux
« migrations clandestines » ! On sait ce que cela
signifie. On sait ce que recouvre à Mayotte « clandestins » ;
il s’agit principalement des Comoriens non originaires de Mayotte.
Comme l’a fait remarquer aux Maorais, leur sénateur Thani, c’est
une reconnaissance effectif
du « choix des Maorais » à quitter les Comores pour
rejoindre la France. Mais il ne faut pas le dire trop fort, ne pas
trop vite chanter victoire. Car les « élus maorais »
préparent les nouvelles étapes : l’intégration pure et
simple de Mayotte dans la COI.
Au
total l’argumentation laborieuse de notre expert en diplomatie se
révèle être un hymne lyrique à la capitulation.
Il
est vrai que notre combat pour Mayotte piétine. C’est la
conséquence des politiques des chefs d’État qui se sont succédé
à la tête du pays depuis 1975. Chacun sait que lorsque les intérêts
de deux pays s’opposent, ils ne se jettent pas des fleurs, ils ne
chantent pas leur amitié. Même les Comores et la France se sont
jetés la pierre : refus d’accueillir les « expulsés de
chez eux» contre refus de délivrer des visas. La différence c’est
que la France mène une politique conséquente qui intègrent tous
les aspects de la lutte (diplomatie, économie, militaire, sociale et
culturelle) alors que du coté comorien, on a l’impression qu’il
s’agit au mieux de mendier des subsides, au pire de tromper
l’opinion comorienne sur cette question extrêmement sensible. Pire
encore on trouve encore des Comoriens de la « haute société »,
des « cols blancs »
qui croient dur
que la France œuvre sincèrement pour le développement des
Comores ! Ils n’ont pas encore compris que la politique
française d’annexion de Mayotte repose sur la misère des autres
îles, ces trois îles qu’il faut absolument séparer pour empêcher
tout retour en arrière. Après Mayotte, le choix porte sur Anjouan
et on y avance à grands pas !
Les
diplomates comoriens qui bombent leur torse et
étalent leurs savoirs devraient
regarder du coté de Maurice qui accomplit des pas sur Diégo-garcia ;
mieux encore, vers
Madagascar qui évolue vers une cogestion des îles éparses occupées
jusqu’ici par la France.
En
tout cas la nation comorienne est un fait tangible comme l’atteste
la culture et les liens de sang. La France parviendra-t-il à briser
ce que l’histoire a produit ? Après plus de 40 ans de
séparation, les liens résistent. Les falsifications du passé se
révèlent vaines. De plus en plus de jeunes, surtout des écrivains,
des artistes et
des sportifs
revendiquent leurs origines, leurs racines. Un phénomène appelé à
se développer. Car même si la situation est relativement meilleure
à Maore, la « magie » de la départementalisation se
dissipe peu à peu.
Les « charmes »
de la colonisation et de l’assistanat ont fait leur temps. L’heure
de la révolte des citoyens désabusés viendra.
Idriss (23/08/2019)
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