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FRONT UNI et UNION NATIONALE


Une des difficultés qui freinent la consolidation de notre nation me semble être notre incapacité à nous unir autour des causes nationales. Aujourd’hui Coronavirus, hier et encore aujourd’hui annexion de Maore par la France.
Je me réjouis que mon appel à l’unité nationale derrière le président Azali pour faire face à l’invasion du Coronavirus n’ait pas suscité le tollé que j’attendais. Je voudrais ici partager l’expérience que j’ai vécue en matière de front uni.
Fin 1974-mi1975 : l’indépendance était quasiment acquise après les plus de 95 % de oui à la consultation du 24/12/1974 sur la question de savoir si les Comoriens voulaient leur indépendance. Le problème était alors la question de Mayotte. Voyant la perspective de l’indépendance se dessiner nettement, les services français réveillèrent le Mouvement Populaire Maorais qu’ils avaient réprimé dix ans auparavant. Le déplacement de la capitale de Dzaoudzi à Moroni, décision française puisqu’on était en période coloniale, engendrait d’énormes problèmes sociaux qui ont suscité la colère légitime des Maorais. La France et les autorités territoriales optèrent pour la trique.
La question fondamentale portait sur Maore. Une lutte ouverte entre le pouvoir Ahmed Abdallah et la France faisait rage et occupait tous les esprits. A l’ASEC (Association des Stagiaires et Étudiants des Comores) on a estimé qu’on ne pouvait pas s’allier à Ahmed Abdallah, un féodal, porteur de valise traditionnel de l’impérialisme français et qui gérait notre pays comme son épicerie. Aujourd’hui j’estime que nous n’avons pas eu raison. Les intérêts bien compris du pays nous commandait de faire front pour contrer la balkanisation sous la direction de ceux qui exerçaient le pouvoir, quel que soit leur nature et leur dangerosité réelle ou supposé.
Septembre 1975. Ali Soilihi avait été placé au pouvoir le 3 août 1975 par la France, un putsch sanction française contre Ahmed Abdallah. Comme me l’avait assuré Ali Toihir (Kéké) à Paris, la question de Maore se réglerait autour d’un verre : l’obstacle c’était Ahmed Abdallah. Hélas pour lui et le pouvoir, la commission franco-comorienne de septembre 1975 de Paris leur asséna un coup de massue : le colonialisme français ne fait pas de cadeau, il s’emparait de Maore. Ali Soilihi se rebella lui aussi malgré ce qu’il savait du destin d’Ahmed Abdallah.
Le pouvoir changea alors de ton : on n’avait pas pris le pouvoir « pour sauvegarder l’amitié franco-comorienne », non la France est devenue l’ennemi principal du pays ; la trahison des amis maorais (Marcel Henry et ses acolytes) fut mise en lumière. Le pouvoir se convertit à la révolution et cherchait de l’aide du coté opposé à l’occident capitaliste. L’occupation de Maore fut dénoncée avec vigueur et des initiatives furent prises envers les instances internationales. C’était aussi l’ère des « révolutions » : au Benin, Congo, Madagascar et même Zaïre on chantait le socialisme. Fait singulier tout de même, aux Comores une politique volontariste de réorganisation de la société, de lutte contre les mœurs rétrogrades, d’alphabétisation prenait forme malgré l’absence de moyens. A l’ASEC on n’a pas été capable de mesurer le changement intervenu, aveuglé par notre haine contre le pantin utilisé par la France pour balkaniser le pays, contre celui qui abattait une répression féroce contre notre peuple . Aujourd’hui j’estime qu’on a manqué de lucidité, l’intérêt bien compris me semble-t-il aujourd’hui, était de surfer sur la vague « pseudo révolutionnaire », empêcher qu’une dictature personnelle s’installe et peser sur l’évolution de la situation.
Années 2000. Plus la politique de la direction du Front Démocratique s’éloignait des orientations d’origine, plus je consacrais mon temps au Comité Maore.
Nous étions un tout petit noyau dur (Thabit, feu Ounkasha Djaffar, Mbaé Toyb et moi). La politique de front uni nous a ouvert un champ d’action inimaginable. Notre première déclaration était signée par tous les partis, y compris celui du pouvoir, Azali à l’époque. Petit à petit les partis politiques tombèrent dans le politicien et nous tournèrent le dos : les pressions françaises semblent-ils ! mais nous avons réussi à entraîner avec nous des personnalités politiques influentes de l’époque Abdallah. Pendant longtemps nous avons bénéficié de l’appui de Mroudjae, Said Hassane Said Hachim, Ali Mlahayili, feu Dr Mouhtar. Ce qui nous a permis de peser sur le cours des choses. Si avant 2005, la question de l’île comorienne de Maore n’occupait plus les devants de la scène, ce n’était plus le cas. Nous avons même réussi à obtenir l’érection du 12 novembre journée nationale Maore même si l’État n’a jamais assumé les responsabilités qui devraient en découler.
A mon avis la question du front uni mérite que l’on s’y penche sérieusement
Idriss (28/03/2020)

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